Pourquoi ?

Parce qu’en ouvrant votre dernier relevé de compte, vous avez constaté une perte de près de 70 % de vos certificats Triodos entre la valeur d’avant mars 2020 et celle d’aujourd’hui.

Et parce que depuis que vous suivez cette affaire, vous constatez de loin en loin que les chose ne s’arrangent pas, et ce d’autant plus que vous ne les comprenez pas, ou plus. Et donc, il est probable que vous émettiez des doutes quant à la gestion de cette problématique par le management depuis mars 2020, période avant laquelle la cotation en interne sur base de la valeur comptable vous avait donné pleinement satisfaction. Celle-ci s’est envolée vers d’autres cieux en même temps qu’a grandi votre perte de confiance en une institution que vous aviez choisie pour les valeurs qu’elle défendait. Bref, la moins-value fait mal, qu’elle soit financière ou éthique, sans compter que un processus de vente qui a été largement complexifié.

Après nous avoir répété d’autorité que l’ancien système de cotation n’était plus valable, la banque et la SAAT ont affirmé sans sourciller que la solution de la cotation boursière via un MTF (Captin) était la meilleure pour les détenteurs de certificats. Ce n’était manifestement pas vrai et je l’ai prouvé avant la cotation dans mes multiples publications. Aujourd’hui, sans sourciller, toutes deux disent que finalement, le système s’est avéré moins performant qu’escompté mais que Captin était le seul choix possible car la mise en route sur Euronext en 2023 était trop complexe pour Triodos. Sauf que cela n’a absolument pas été communiqué comme tel en décembre 2022, lors de la fixation du choix MTF. Bref, une fois encore, et comme toujours, c’est du grand n’importe quoi !

Indépendamment de l’inadéquation d’Euronext au modèle fondamental de Triodos en tant que banque durable, on veut désormais nous faire croire que la cotation sur la bourse européenne est le meilleur choix. Quand le public des détenteurs va-t-il se réveiller et comprendre qu’il est depuis belle lurette impossible de faire confiance à quelques branques qui s’évertuent à nous mettre dans la panade ? Entendons-nous bien : il y a lieu de faire une distinction entre la mission de la banque et ceux qui sont à la manœuvre pour la mettre en pratique. Le travail de la banque est et reste important au vu du soin réel apporté aux thèmes sociaux, culturels et environnementaux par d’innombrables petites mains. Mais je me suis positionné différemment en ce qui concerne la gestion des titres par le management ancien, actuel et futur, puisqu’on nous a annoncé le départ du présent CEO à mi-2025.

Depuis le début de la crise, ces hommes de tête se sont évertués à paver la gestion des certificats de décisions prises à l’encontre de tout bon sens, du point de vue des actionnaires, en tout cas. Nous avons eu droit à une succession de résolutions justifiées par des obligations diverses et très opportunes qui nous ont immanquablement amenés à cette « solution » du MTF Captin, et bientôt à la cotation sur Euronext (si le projet se concrétise), la banque reniant ainsi au passage ses convictions antérieures. Car le choix d’une plateforme de cotation implique un aspect spéculatif par le jeu de l’offre et de la demande. Question : est-ce bien là la place d’une banque durable ? D’après nos apprentis pyromanes, cela ne changera rien aux fondements de la Banque. Qui peut encore les croire ?

Mais manifestement, la réponse importe peu car aujourd’hui, pour Triodos, le travail est fait : elle a rétabli la cotation ! Peu importe le prix, d’autant que ce n’est pas elle qui le paie. Dans ce cadre, comment faire (encore) confiance à ces gens qui, auto-satisfaits, n’ont pas de scrupules à sacrifier sur l’autel de l’efficacité leurs supporters les plus fervents ? Pour moi, rien n’indique un changement à venir dans le credo de la banque : «  Je peux faire des erreurs, mais je n’ai jamais tort ! ».

Fort d’une expérience professionnelle de plus de 26 ans avec l’institution batave (en sa section belge), j’ai malheureusement vite compris dès 2020 que quelque chose clochait au pays des fées fromagères. Il m’a fallu du temps pour démêler les fils d’un tissage complexe et publier un premier rapport documenté en octobre 2022, qui a mené à la création du Trioforum, organe d’information parallèle et critique accessible à tous. Puis, j’ai lancé une action collective avec le support du cabinet SQ-Watt légal en mars 2023. Le train est aujourd’hui sur les rails, mais le combat continue. Et il est bien utile car ceux qui se sont timidement mis debout ont malheureusement dû constater que faire entendre leur voix auprès de la banque ou de la SAAT n’était pas un exercice facile. Ils se sont contentés de réponses souvent absconses, estimant qu’il ne fallait pas faire trop de bruit pour éviter de nuire à la banque et par ricochet, à la valeur des certificats. Avec une cotation aujourd’hui largement en berne par rapport à la valeur comptable, ils connaissent le prix qu’ils doivent payer pour suivre +/- docilement le discours de leur maître. 

Honnêtement, je comprends qu’on défende son capital et ses idéaux autant que possible, en bon gestionnaire familial. Toutefois, je ne sais pas exactement quelle satisfaction on peut tirer d’une attitude qui s’applique à dire : « Ne bougeons pas car ça pourrait être pire ». D’autres l’ont déjà fait : mauvais choix ! Ce qui m’amène à un questionnement tout bête : à partir de quels niveaux de perte financière et de moralité se piquera-t-on de ne plus trouver une justification à un attentisme couronné d’insuccès ? Quand il sera trop tard ? J’estime pour ma part qu’agir pour un mieux est défendable économiquement parlant et ne mettra absolument pas la banque en péril. Nous sommes +/- 500 demandeurs et il y a 43.000 détenteurs… D’ailleurs, elle a déjà provisionné des fonds pour traiter les affaires pendantes et à venir. Il y a donc des raccourcis intellectuels qui me laissent frais.

J’aurais comme tout un chacun préféré une prise en main satisfaisante du problème, par un management compréhensif, compétent et responsable. Que faire lorsque ces adjectifs ne répondent pas à l’appel du jour, de la veille et du lendemain ? Pour peu qu’on s’arme de courage, poser la question, c’est forcément y répondre. Pour ma part, si je me suis levé pour faire entendre ma voix et devenir le relais d’autres, c’est à la suite d’un long processus qui m’a fait comprendre qu’on me prenait pour un demeuré. En physique quantique, je veux bien. Dans le cas des certificats, non. Voilà pourquoi, en sus de l’aide que j’ai souhaité apporter à mes (anciens) clients et camarades désemparés qu’il me déplaisait de laisser sur le trottoir, j’ai décidé de prendre la plume et de porter le débat vers de plus hautes marches avec l’aide de Maître Arnauts.

Notre action collective est encore ouverte aux nouveaux entrants et je veux vous dire ici que vous n’êtes pas seul(e). Je vous invite à agir, de la manière que vous jugerez la plus adéquate (des pistes sont données sur ce site et un article spécifique traite même du sujet – voir page d’accueil). Car il est parfaitement évident que pour la banque, le travail est fait. Certains vivotent encore dans l’espoir qu’une discussion ouvrira des perspectives. D’autres commencent seulement à se rendre compte des limites de l’exercice, vivant dans l’illusion sèche d’une grande désespérance. Peut-être la banque considère-t-elle que le bruit des feuilles mortes est durable, éthique et convivial. Je ne suis pas de cet avis. J’ose espérer que vous non plus.

Bernard Poncé, animateur du Trioforum