L’opération de rachat

Introduction

Dans la foulée du choix de cotation des certificats sur le MTF Captin et de l’établissement d’une valeur économique à 59 €, la banque annonce fin décembre 2021 qu’elle va lancer en février une opération de rachat de certificats et de solidarité. Émois dans les rangs des détenteurs… Une solution va-t-elle se dégager ?

Hélas, il faut déchanter (air connu)

Lors d’un séminaire, on nous annonce avec une incroyable fierté et presque la larme à l’œil que la banque se propose de mettre en place un programme de rachat de certificats en utilisant les 14 millions qui restent dans le buffer. L’opération doit toutefois encore recevoir l’aval de son autorité de contrôle. Elle pourra ainsi racheter jusqu’à 2 000 € de certificats à chaque détenteurs, et, pour ceux qui sont dans des difficultés vraiment graves, la banque pourra aller jusqu’à 6 000 €. Question lancinante : à quel prix se fera le rachat ? À 59 €, nous annonce-t-on benoîtement et sans aucune gêne, puisque c’est la valeur déclarée au fisc !

Problème n° 1

Cette opération peut-être partie d’un bon sentiment 1Vu les critiques, la banque s’est empressée de signaler que l’initiative de cette opération revenait à la SAAT. mais validée par le management de Triodos était bancale dès le départ. Et c’est ça qui pose question. En effet, comment une autorité de contrôle aurait-elle pu accepter un programme où certains détenteurs bénéficient d’un avantage sur base d’une difficulté sociale dont l’importance serait laissée à l’appréciation de Triodos ? Laquelle nous avait jusque-là répété qu’elle devait respecter l’équité entre actionnaires (principe de base d’un capitalisme de bon aloi).

Dès lors, à partir du moment où un simple quidam comme moi peut se rendre compte du twist (et je n’ai pas été le seul), comment expliquer que des managers censés être de haut niveau ont pu louper le coche ? La raison indique qu’ils n’ont pas pu se planter à ce point tellement c’est évident. Et donc, c’était quoi le but, sinon avoir une excuse pour le volet suivant : vider le buffer pour être sûr de ne plus revenir vers l’ancienne formule de cotation !

Problème n° 2

Le public a-t-il bien eu conscience de ce que Triodos a proposé sans vergogne et avec un aplomb de dingue ? Racheter un certificat à 59 € alors qu’elle nous l’a vendu à 84 € un peu plus d’un an auparavant ! Comment appelez-vous cela ? Un procédé maffieux ? Pourquoi pas ? En tout cas, pas un procédé éthique. Ou alors, nous n’avons pas les mêmes notions quant aux valeurs morales en vigueur.

On me rétorquera que j’y vais fort ? Hé bien, excusez-moi, mais pas tant que ça ! Je rappelle que c’est la banque elle-même qui, en décembre 2021, a fixé le cours de 59 € ! J’aurais pu mieux accepter la chose si elle avait été dictée par une autorité quelconque. Comme nous l’avons vu, cela n’a pas été le cas. 

Problème n° 3

Il est évident que ce programme inconséquent avait un but différent de celui annoncé. Je pense qu’il y en avait en fait deux.

Le premier était d’ancrer le cours de 59 € dans une réalité tangible. Car jusque-là, il n’était que théorique, comme la banque l’annonçait elle-même. Racheter à 59 €, c’était enfoncer le clou pour une cotation future et donner une direction précise aux premiers cours. C’est d’ailleurs ce qui s’est passé, le carnet d’ordre de l’époque montrant des ordres à 60 € dès le départ. C’est pour cela que j’estime que la banque a commis un délit d’initié public et à l’avance !

Pour comprendre le second, il faut se remémorer les boulets rouges qui ont été tirés en direction de Triodos suite à son annonce officielle. Elle a finalement mis son projet entre parenthèses pour nous annoncer en août 2022 que compte tenu du développement prochain de la cotation sur MTF, l’opération de rachat était annulée. Ce qu’elle a soigneusement omis de dire au passage, c’est que les autorités de contrôle avaient évidemment recalé cette féérie ornementale.

Vraisemblablement, il faut se dire que c’est sans doute ce qu’attendait Triodos. Car sans traîner, elle nous a dit que les 14 millions du buffer seraient dès lors transformés en un dividende intermédiaire. De quoi contenter les détenteurs, sans doute. On ne me tire quand même pas de la tête que toute cette opération ne relève pas du hasard et d’une bonne volonté mal placée. Parce que si c’est le cas, cela veut clairement dire que le management est complètement à côté de ses pompes. Et comme il est toujours là actuellement, ça ne présagerait rien de bon pour le futur. Relisez ceci quand vous prendrez connaissance de ma conclusion.

En attendant, à vous de choisir votre version des faits.

Problème n° 4

En mettant ce plan en place, Triodos a sciemment suscité questionnements (au mieux) et déconvenues (au pire), tout en réussissant la gageure d’alourdir encore le passif de confiance des détenteurs de certificats. C’était évidemment prévisible, sauf à faire preuve d’une grande naïveté. Ce qui veut dire que contrairement aux grandiloquences qu’elle nous sert sur l’écoute et la bienveillance, elle a montré le dédain qu’elle pouvait se permettre envers les détenteurs pour arriver à ses fins. Ce n’est malheureusement pas une nouveauté.

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    Vu les critiques, la banque s’est empressée de signaler que l’initiative de cette opération revenait à la SAAT.