Chers membres du Trioforum,
Voici venu le temps des fêtes, propices aux vœux, mais également aux réflexions. Permettez-moi donc de vous en livrer quelques unes.
Tout d’abord, je souhaite vivement remercier tous ceux qui nous ont soutenu cette année encore et / ou qui ont œuvré au développement de notre association. Je pense bien sûr aux membres de notre comité, Michel, Patrice et René ; à nos observateurs actifs Paul et Peter ; et à nos 125 donateurs qui nous soutiennent depuis le début (au passage, merci à la « petite » dernière, Marie-Laure 🙂 )
Évidemment, je ne puis et ne voudrais passer sous silence l’accompagnement de Maître Arnauts et de tous les membres de son cabinet, eux qui nous permettent de naviguer en des eaux chahutées. Il y a là des petites mains qui, malgré quelques difficultés, méritent toute notre sympathie parce que malheureusement le système judiciaire belge n’est pas tendre avec les moins nantis (et même ceux qui le sont).
On nous a parfois dit que dans l’affaire des certificats, les choses étaient simples et qu’elles pouvaient aller vite : la banque a dit qu’elle n’irait pas en bourse ; les documents publiés étaient clairs (cotation interne basée sur la valeur comptable) ; ils ne nous ont pas dit qu’ils pouvaient changer les choses ; le management nous a pris en otage ; etc. Il suffirait pour certains de jeter ces vérités à la face d’un juge avec les documents de souscription pour qu’il accepte nos doléances. Hélas, outre le fait qu’il faut déjà arriver à rencontrer le magistrat, la réalité est autre et les jugements espagnols montrent que s’il est possible de démontrer qu’il y a eu négligence dans le chef de la banque lors de la vente, ce n’est pas l’avis de tous les alcades. Preuves en sont ces trois affaires qui ont dû être portées auprès de leur cour suprême par des détenteurs ibères déboutés précédemment.
Nous n’avons donc pas été vite en besogne. Nous avons constitué un dossier qui tient la route et aborde de nombreux volets de l’affaire. Nous avons pu relever les manquements de la banque et surtout ses agissements délétères en totale contradiction avec les valeurs qu’elle est censée véhiculer. Paradoxalement et malgré des évidences qui nous semblent assez flagrantes, on nous a parfois reproché de ne pas chercher le dialogue.
Ceux de cet avis pensent évidemment aux efforts non négligeables prodigués par la SCTB hollandaise. Force est de constater que cette fondation comporte en son sein beaucoup d’espoirs. Mon expérience ne va pas dans le même sens, ni celle de tous les acteurs connus qui se sont confrontés à la notion de dialogue avec la banque. À part nos amis bataves qui disposent sans doute de ressources inconnues, je ne vois personne qui ait pu un tant soit peu obtenir une véritable avancée dans ce dossier en fondant ses démarches uniquement sur des échanges constructifs.
En ce qui me concerne, il m’est très vite apparu que la seule voie possible pour une démarche de recouvrement était celle qui passe par la case judiciaire. C’est sûrement dommage, mais c’est juste comme ça que la banque oriente le débat, vu qu’il est impossible. Dans une relation amoureuse, on parle de manipulation. Analysez les évènements avec un peu de recul, et vous verrez que l’adage « qui aime bien châtie bien » est totalement en adéquation avec les vues de Zeist. Le problème étant que le bâton ne se trouve pas du côté des détenteurs. Bon, après, vous me direz qu’on peut trouver du plaisir à se faire battre. À chacun son truc, finalement…
En attendant, nous avançons. Certes, lentement, la faute à une justice qui ne se presse pas. Au moins 2025 verra nos premiers développements s’épanouir en conclusions argumentées par nos avocats respectifs. Mais il faut se méfier de trop de candeur et rester prudent. C’est de bonne guerre. Est-ce pour cela que l’on m’a posé quelques fois ces temps derniers la question de savoir si nous avions nos chances de gagner ? Sous-entendu : est-ce que ça vaut la peine de payer une nouvelle provision si c’est pour partir dans le décor et donc, perdre encore plus ?
Ce que pose cette question, c’est non seulement celle d’une (quasi) gratuité d’action qui devrait échoir à l’innocent détenteur floué, mais également celle de la certitude d’un devenir futur. Voudrait-on que je prenne la responsabilité de rassurer le bon peuple des actionnaires cocufiés qu’on ne s’y prendrait pas autrement. La seule certitude qui serait générée dans ce cas serait celle de me voir honni en cas de défaite, tant il est souvent plus facile de tirer sur l’ambulancier. La chose ne relevant personne, on me permettra donc de passer mon tour.
Néanmoins, aux indécis et aux anxieux, adjectifs qui sont loin d’être passibles d’amende en ces temps aussi troublés qu’une Caracole, je puis affirmer une chose : je ne me serais pas engagé dans ce processus de défense de nos intérêts si je n’avais pas cru dès le départ et plus encore maintenant en nos chances de réussite. Si la flagellation n’est pas un art mineur pour quelques radicaux, elle l’est certainement pour moi. Vous savez parfaitement le temps que j’ai pu consacrer jusqu’ici à ce projet du Trioforum et je ne pourrai en avoir le moindre regret. Dès lors, oui, je crois en nous. Et d’après ce que je vois, je ne suis pas le seul.
Je sais parfaitement que payer une provision est une opération de délestage monétaire délicate qui fait sans doute mal à plus d’un. C’est, répétons-le, le prix à payer pour un accès à une justice incertaine et relative. Mais c’est la seule à disposition et comme au poker, il faut payer pour voir. Et les amateurs le savent, ce jeu ne repose pas moins sur la chance que sur la statistique. Jusqu’à présent, dans les cas similaires au nôtre défendus de Madrid à Barcelone, les chiffres sont favorables aux détenteurs lésés. C’est un constat.
Pour le reste, il y a trop de paramètres aléatoires pour m’engager plus avant dans des circonvolutions divinatoires aussi impétueuses que grotesques, d’autant que je ne suis pas payé pour. La seule chose dont je suis certain, c’est que le travail souvent paie. Et là, les heures passées à me soucier de vous ne se comptent plus (et cela n’a d’ailleurs jamais été les cas). C’est un atout qui a permis de mettre en place une construction aux murs épais. Pour le reste, j’ai l’honneur et l’avantage de pouvoir encore penser qu’une humanité ne se résume pas à une histoire de (gros) sous. Tant que je le peux, et même si malheureusement c’est aujourd’hui considéré comme un luxe, je me plais à croire qu’il y a des combats qui méritent d’être livré debout et pas derrière une calculette.
Laissons maintenant la justice et notre conseil faire leur job. Et continuons à respirer, non sans nous amuser un peu. Les heures qui viennent nous y invitent. C’est pourquoi je vous souhaite en mon nom et celle de notre équipe, une très bonne fête de Noël et une excellente année 2025.
Bernard Poncé,
Animateur du Trioforum