Une cotation estivale. Bonne idée ?
#1
Dans la foulée de la parution d'articles de presse à propos de la première cotation des certificats (voir dans la section "Presse" de ce forum), la banque a publié un communiqué qui appelle quelques commentaires.


Hyperbolisme de bon aloi

Même si l'action de notre avocat a joué dans les termes utilisés, et que les journalistes n'ont pas été dupes des hyperboliques précautions oratoires habituelles de la banque, il est fort à craindre (d’après mes informations) que ce report d'une semaine par rapport au programme initialement prévu ne soit plus pragmatiquement le fait que d'une machinerie Captin toussotant et dont les rouages peinent à être huilés. Rappelons que nous sommes en face d'un petit pécheur qui vu un gros poisson. 

On peut dans la foulée se demander si une introduction en bourse en début de vacances est une bonne idée et/ou pourquoi ce timing a été choisi. Un rapide coup d'oeil sur les IPO (introduction en bourse) sur New-York et Paris montre qu'il y en a tout au long de l'année. Il serait donc utile de trouver une étude qui montre l'influence éventuelle des congés sur une IPO, mais je ne vais pas m'amuser à chercher.

Par contre, tout en n'étant certainement pas un spécialiste des IPO, la première idée qu’on peut avoir est qu’en profitant d’une période plus calme, la banque souhaite diminuer le nombre de vendeurs actifs par rapport au nombre de comptes ouverts, lesquels sont censés appartenir aussi à des acheteurs. Le but : diminuer la volatilité, c'est-à-dire les grands écarts de prix entre vendeurs et acheteurs, et des mouvements (trop) forts entre deux cours. 

Pourquoi vouloir agir sur ce facteur ? Parce qu’une grande volatilité n’est pas la bienvenue, en tout cas pour le public habituel des détenteurs qui ne sont majoritairement pas des spéculateurs, par définition. Or, cette volatilité risque bien d’être très présente en début de cotation. D’une part, la banque nous seriné et vendu que l’arrêt initial de la cotation était du à un flux trop important de vendeurs, lesquels sont donc censés attendre au portillon ce 28 juin, et d’autre part, le nombre de détenteurs pouvant actuellement opérer des transactions est assez faible. En effet, seuls 26 % (derniers chiffres) des détenteurs ont ouvert un compte de transaction. 


Ouvrons une parenthèse

Soyons honnêtes : il est difficile de dire si ce taux de 26 % est un insuccès, comme on pourrait le penser à première vue. Plusieurs éléments interviennent dans le questionnement :

- Les opérations administratives compliquées liées à l’enregistrement et l’ouverture d’un compte de transaction n’aident en rien.
- De nombreux détenteurs hors Pays-Bas restent réticents à devoir ouvrir un compte à l’étranger à l’heure où les législations anti-blanchiment (et leurs contraintes) ne favorisent pas du tout ce genre de choses.
- Une partie des détenteurs sont manifestement contre le procédé du MTF et ne veulent donc pas favoriser son éclosion.
- Il est vraisemblable qu’une partie des détenteurs campe sur sa position, dans le cadre d’une heureuse fidélité à la mission de la banque, tout simplement parce qu’elle ne souhaite pas vendre, ou n’en ressent pas l’obligation financière.
- Enfin, il n’est pas du tout improbable qu’une grande partie des détenteurs ne comprennent rien du tout à ce qui se passe, suite, notamment, à une communication Triodos pléthorique et souvent absconse. 

Voyez à ce sujet mon article dans la section « En pratique ».

Fermons la parenthèse

En attendant, il est normal de penser que la banque tenterait d’adoucir une cotation possiblement chahutée par une entrée en bourse estivale. Elle a d’ailleurs bien exprimé la chose dans son communiqué, même si c’est en bottant en touche, comme d’habitude : Veuillez noter que le rétablissement de la négociation après une période de suspension prolongée peut entraîner d'importantes fluctuations de l'offre et de la demande et, donc des conséquences sur la fixation des prix peuvent apparaître, y compris des situations où, temporairement, aucune transaction ne peut avoir lieu.

On veut bien la croire, d’autant qu’un élément n’apparaît pas dans le texte : les 26 % d’inscrits ! Quelles que soient les raisons évoquées ci-dessus, ce n’est pas énorme. Or, moins il y a d'intervenants, plus les cours proposés à la vente et l'achat peuvent être distendus. Et ça peut faire mal ! On est dès lors en droit de se poser, à nouveau, des questions quant à la pertinence du procédé de cotation via Captin. Car au final, s'il n'y a que 26 % de comptes de transaction ouvert à ce jour, qu'en est-il du fameux flux de vente qui a initié l'arrêt des transactions et qui, si l'ont en croit la banque, a perduré jusqu'ici ! Est-ce que les 26 % d'inscrits sont ces vendeurs du premier jour de la tempête ? Si oui, et s'ils placent tous des ordres de vente, ils vont rigoler...


Conclusion 

Malgré tout, le fait de lancer une introduction en bourse pendant les vacances, compte tenu :

- d'une cotation à la semaine dans un marché qui devra au début absorber un flux vendeur (si on reste dans la logique de ce qui a été communiqué), 
- et du profit d'un éventuel effet d'inertie de vacances 

devrait profiter à la cotation pour prendre le temps de trouver ses marques. Est-ce que ça va marcher ? Je n’en sais rien, et je m’en moque un peu car, en très résumé, notre mouvement de contestation est gagnant dans les deux cas de figures :

- Si le cours se plante, nous aurons un argument supplémentaire pour démontrer que le choix MTF de Triodos n'était pas le bon, et sûrement pas la moins mauvaise des solutions, comme le management l’a exprimé.
- Si la cours fait bonne figure, cela voudra dire qu'il y a plus d'acheteurs que de vendeurs, et on pourra se demander très légitimement où sont les vendeurs en masse de 2020 ?

À ce propos, en écrivant cet article, je me suis demandé si la mésaventure des certificats était arrivée dans d’autres structures coopératives ou du +/- même acabit. Certes, Triodos est unique, mais nous étions en 2020 dans un mouvement de panique en masse. Y a-t-il eu ailleurs, et je ne parle pas de sociétés cotées sur une vraie bourse, de tels mouvements ? Il y a un endroit qui pourrait peut-être apporter une réponse à cette question : Captin. D’autres sociétés, certes plus modestes, y sont cotées. Comment les actionnaires et les managers de ces sociétés ont-ils réagis ? En voilà une question intéressante… :-)
  Répondre
#2
(06-22-2023, 01:26 PM)Bernard Poncé - Admin a écrit : Dans la foulée de la parution d'articles de presse à propos de la première cotation des certificats (voir dans la section "Presse" de ce forum), la banque a publié un communiqué qui appelle quelques commentaires.


Hyperbolisme de bon aloi

Même si l'action de notre avocat a joué dans les termes utilisés, et que les journalistes n'ont pas été dupes des hyperboliques précautions oratoires habituelles de la banque, il est fort à craindre (d’après mes informations) que ce report d'une semaine par rapport au programme initialement prévu ne soit plus pragmatiquement le fait que d'une machinerie Captin toussotant et dont les rouages peinent à être huilés. Rappelons que nous sommes en face d'un petit pécheur qui vu un gros poisson. 

On peut dans la foulée se demander si une introduction en bourse en début de vacances est une bonne idée et/ou pourquoi ce timing a été choisi. Un rapide coup d'oeil sur les IPO (introduction en bourse) sur New-York et Paris montre qu'il y en a tout au long de l'année. Il serait donc utile de trouver une étude qui montre l'influence éventuelle des congés sur une IPO, mais je ne vais pas m'amuser à chercher.

Par contre, tout en n'étant certainement pas un spécialiste des IPO, la première idée qu’on peut avoir est qu’en profitant d’une période plus calme, la banque souhaite diminuer le nombre de vendeurs actifs par rapport au nombre de comptes ouverts, lesquels sont censés appartenir aussi à des acheteurs. Le but : diminuer la volatilité, c'est-à-dire les grands écarts de prix entre vendeurs et acheteurs, et des mouvements (trop) forts entre deux cours. 

Pourquoi vouloir agir sur ce facteur ? Parce qu’une grande volatilité n’est pas la bienvenue, en tout cas pour le public habituel des détenteurs qui ne sont majoritairement pas des spéculateurs, par définition. Or, cette volatilité risque bien d’être très présente en début de cotation. D’une part, la banque nous seriné et vendu que l’arrêt initial de la cotation était du à un flux trop important de vendeurs, lesquels sont donc censés attendre au portillon ce 28 juin, et d’autre part, le nombre de détenteurs pouvant actuellement opérer des transactions est assez faible. En effet, seuls 26 % (derniers chiffres) des détenteurs ont ouvert un compte de transaction. 


Ouvrons une parenthèse

Soyons honnêtes : il est difficile de dire si ce taux de 26 % est un insuccès, comme on pourrait le penser à première vue. Plusieurs éléments interviennent dans le questionnement :

- Les opérations administratives compliquées liées à l’enregistrement et l’ouverture d’un compte de transaction n’aident en rien.
- De nombreux détenteurs hors Pays-Bas restent réticents à devoir ouvrir un compte à l’étranger à l’heure où les législations anti-blanchiment (et leurs contraintes) ne favorisent pas du tout ce genre de choses.
- Une partie des détenteurs sont manifestement contre le procédé du MTF et ne veulent donc pas favoriser son éclosion.
- Il est vraisemblable qu’une partie des détenteurs campe sur sa position, dans le cadre d’une heureuse fidélité à la mission de la banque, tout simplement parce qu’elle ne souhaite pas vendre, ou n’en ressent pas l’obligation financière.
- Enfin, il n’est pas du tout improbable qu’une grande partie des détenteurs ne comprennent rien du tout à ce qui se passe, suite, notamment, à une communication Triodos pléthorique et souvent absconse. 

Voyez à ce sujet mon article dans la section « En pratique ».

Fermons la parenthèse

En attendant, il est normal de penser que la banque tenterait d’adoucir une cotation possiblement chahutée par une entrée en bourse estivale. Elle a d’ailleurs bien exprimé la chose dans son communiqué, même si c’est en bottant en touche, comme d’habitude : Veuillez noter que le rétablissement de la négociation après une période de suspension prolongée peut entraîner d'importantes fluctuations de l'offre et de la demande et, donc des conséquences sur la fixation des prix peuvent apparaître, y compris des situations où, temporairement, aucune transaction ne peut avoir lieu.

On veut bien la croire, d’autant qu’un élément n’apparaît pas dans le texte : les 26 % d’inscrits ! Quelles que soient les raisons évoquées ci-dessus, ce n’est pas énorme. Or, moins il y a d'intervenants, plus les cours proposés à la vente et l'achat peuvent être distendus. Et ça peut faire mal ! On est dès lors en droit de se poser, à nouveau, des questions quant à la pertinence du procédé de cotation via Captin. Car au final, s'il n'y a que 26 % de comptes de transaction ouvert à ce jour, qu'en est-il du fameux flux de vente qui a initié l'arrêt des transactions et qui, si l'ont en croit la banque, a perduré jusqu'ici ! Est-ce que les 26 % d'inscrits sont ces vendeurs du premier jour de la tempête ? Si oui, et s'ils placent tous des ordres de vente, ils vont rigoler...


Conclusion 

Malgré tout, le fait de lancer une introduction en bourse pendant les vacances, compte tenu :

- d'une cotation à la semaine dans un marché qui devra au début absorber un flux vendeur (si on reste dans la logique de ce qui a été communiqué), 
- et du profit d'un éventuel effet d'inertie de vacances 

devrait profiter à la cotation pour prendre le temps de trouver ses marques. Est-ce que ça va marcher ? Je n’en sais rien, et je m’en moque un peu car, en très résumé, notre mouvement de contestation est gagnant dans les deux cas de figures :

- Si le cours se plante, nous aurons un argument supplémentaire pour démontrer que le choix MTF de Triodos n'était pas le bon, et sûrement pas la moins mauvaise des solutions, comme le management l’a exprimé.
- Si la cours fait bonne figure, cela voudra dire qu'il y a plus d'acheteurs que de vendeurs, et on pourra se demander très légitimement où sont les vendeurs en masse de 2020 ?

À ce propos, en écrivant cet article, je me suis demandé si la mésaventure des certificats était arrivée dans d’autres structures coopératives ou du +/- même acabit. Certes, Triodos est unique, mais nous étions en 2020 dans un mouvement de panique en masse. Y a-t-il eu ailleurs, et je ne parle pas de sociétés cotées sur une vraie bourse, de tels mouvements ? Il y a un endroit qui pourrait peut-être apporter une réponse à cette question : Captin. D’autres sociétés, certes plus modestes, y sont cotées. Comment les actionnaires et les managers de ces sociétés ont-ils réagis ? En voilà une question intéressante… :-)
Excellent article. Merci !
  Répondre


Atteindre :


Utilisateur(s) parcourant ce sujet : 1 visiteur(s)